Encore Bernard Guetta qui vient nous rabâcher son ragoût sans sel, sans sucre, sans épices. Jeudi dernier, au milieu du bruit et du sang des émeutes des rues arabes, il déclarait benoitement :
"le monde musulman vient là d’infliger un démenti aussi cinglant que salutaire à ceux qui le décrivent comme globalement fanatique et violent car le meurtre, mardi soir, des diplomates américains ne relevait en rien d’une hystérie de foules sanguinaires"
"la culpabilité morale des auteurs de ce film n’en sont pas moins immenses"
"Partout, des pans entiers de l’islamisme y rompent avec le djihadisme, commencent à accepter le jeu démocratique, comme en Turquie, et s’éloignent de courants violents qui leur reprochent cette évolution"
Le raisonnement s'articule en trois temps :
1° quelques exaltés ont tué l'ambassadeur des Etats-Unis en Lybie
2° le véritable responsable est l'auteur de la vidéo sacrilège
3° la Turquie est le modèle que suivent en réalité les rues arabes.
Décortiquons :
1° le problème que ne mentionne pas le père Guetta est que l'assassinat d'un représentant de la culture occidentale n'est qu' un épiphénomène au milieu des carnages perpétrés contre les chrétiens au Nigéria, en Syrie, au Pakistan, en Indonésie, la peur de l'anéantissement qu'éprouvent coptes en Egypte, diverses obédiences non musulmanes en Syrie, la réalité douloureuse de l'exode des chrétiens d'Irak, la sauvagerie de la mainmise de l'Islam intégriste sur le nord du Mali.
2° la vidéo sacrilège qu'incrimine saint Guetta est de son aveu même un prétexte; qui n'a compris qu'il s'agissait de célébrer (si l'on ose dire) le 11 septembre; les invocations à Ben Laden (plutôt Oussama qu'Obama criaient les manifestants), la bannière étoilée brûlée en sont des signes manifestes;
3° la Turquie, invoquée à tour de bras par le révérend Guetta, est un drôle de modèle, hésitant entre la dictature militaro-fasciste et la dérive islamiste; se laisser obnubiler par la réussite économique de ce pays, l'intelligence de sa diplomatie, la puissance de son armée ne peut masquer la réalité d'un pays intolérant, qui tente d'affronter de difficiles problèmes sociaux et ethniques, par l'exaltation de la nation turque et de la religion sunnite.
Rien dans les faits ne contribue à l'optimisme béat de Dom Guetta. Mais qu'importe la réalité, seul compte pour lui l'univers radieux et hors-sol qu'il nous inflige depuis belle lurette.