Le délire médiatique a explosé. Les images du lynchage de Khadafi nous ont été montrées avec complaisance, en boucle, en détail ; la petite gêne des présentateurs se manifestait timidement dans le simple commentaire que ces images pourraient choquer des enfants. Mais ce ne sont pas que les enfants que cela choque, mais tous les adultes qui ont un mouvement de répulsion devant l’étalage de la cruauté, de la bêtise, de la mort donnée à celui qui est à terre par ceux qui on les armes. On se croyait revenu au temps des exécutions publiques, lorsque l’on servait au bon peuple, sa ration de sang, d’os écrasés, de têtes décapitées.
Le surprenant n’est pas que des actes de barbarie adviennent durant une guerre, mais l’acceptation par les journalistes d’une quasi normalité de ces actes, et de l’obligation qui en découlait de les montrer. L’un nous dit « cela existe, il faut donc le montrer », ce qui est absurdité et la négation même du travail de l’informateur qui est de choisir , trier, hiérarchiser. L’autre nie la réalité en nous précisant, au moment même où les images sont diffusées, « nous ne savons pas encore si Khadafi a été exécuté » ou « une enquête va être menée ». Le meilleur, il le sait, fut Bernard Henri-Levy qui après a excusé cette indignité en se réfugiant sous le parapluie de l’histoire : « notre Révolution Française a laissé faire les massacres de septembre ». BHL courant de plateau en plateau, pour célébrer « sa » victoire, offrait à l’ensemble des journalistes cette merveilleuse excuse d'entendre un philosophe, ami des révoltés de Benghazi, absoudre en direct des atrocités, au nom d’un égarement passager et de la justification par des objectifs révolutionnaires.
Comme un impérator sanglant, BHL « le lybique » éructait au micro sa compassion pour les exécuteurs, et son exécration de l’exécuté.