Elle a donc trouvé son gigolo trop cher, pour aller lui faire un procès en extorsion de fonds ? Pendant des années, elle a pondu livres et films relatant avec complaisance sa recherche du plaisir, de la jouissance : elle en trouve, elle en en crie et ne veut pas payer. Elle nous a assommé de ses états d'âmes, en prétextant que c'était de la littérature ou du cinéma, et maintenant elle nous accable des détails sordides de sa vie dans les prétoires, en croyant que c'est recherche de justice, alors qu'il s'agit au mieux du hurlement d'un Harpagon femelle déplorant la perte de sa cassette, ou de la vengeance d'une amoureuse déçue de la froideur de son sigisbée.
Plus que de la femme déçue, c'est la procédure de l'intellectuelle dont la vanité a été éraflée . La manipulatrice manipulée. La penseuse bafouée par un médiocre. La scribouillarde de romans et de scénarios, flouée par un inventeur d'intrigues véritables. Car Rocancourt n'a peut-être guère de talent de plume ou de réflexion, mais il est un authentique aventurier, autrement vivant que les vedettes sexuelles qui grenouillent dans l'imaginaire de la dame. Et la dame, furibarde, non seulement l'envoie en prison, mais tente à tout prix de détruire les quelques souvenirs, vrais ou faux, qu'a tenté de se construire le pauvre Rocancourt.
Misérable ? c'est peut-être le condamné, c'est surtout la pimbêche qui se sert de ses faiblesses pour mieux accabler son ennemi.