La séparation de l’église et de l’état est une idée chrétienne qui apparaît dans l’évangile. Idée qui a été maltraitée entre des princes qui ont souvent voulu contrôler l’Eglise, et plus rarement une dérive théocratique des autorités religieuses. Mais malgré les vicissitudes, contrairement à ce qui est parfois dit, la pratique fondamentale est que la religion chrétienne a réussi à garder son autonomie ; les interventions des puissants dans les conciles ont toujours paru scandaleuses ; le choix des évêques par les princes, les rois et les empereurs ont toujours soulevé la réprobation .
Cette lutte pour l’autonomie a été marquée par des reculs comme l’idée du césaro-papisme, la main-mise par des souverains protestants sur la religion de leurs peuples, la tentation des papes de se créer un état ; mais elle a été aussi marquée par de puissantes avancées, comme la réforme grégorienne, la création en continu, à toutes les époques, d’ordres religieux dont le rayonnement était étroitement corrélé à leur indépendance vis-à-vis de tous les pouvoirs (bénédictins, cisterciens, franciscains etc…).
La laïcité est une idée chrétienne (surtout catholique) qui sépare le peuple entre deux catégories, les clercs qui donnent leur vie à Dieu et à la propagation de la foi, les laïcs qui exploitent au mieux leurs talents pour être des témoins de Dieu. Ce vieux concept n’impliquait jamais que la vie religieuse soit uniquement du ressort de la sphère privée, et que les manifestations de foi restent cachées. Là est la différence avec la république laïque défendue depuis les origines de la IIIème République : elle a puisé son inspiration dans les concepts chrétiens de séparation de l’Eglise et de l’Etat, de différence entre laïcs et clercs en les poussant jusqu’à la caricature : le signe extérieur de religiosité devient une offense, voire une infraction, la foi est réduite à une simple appétence privée pour la divinité.
Ces approches sont offensantes pour les catholiques, les chrétiens, certes, mais surtout sont parfaitement incompatibles avec les religions de nature théocratique comme l’Islam et la religion juive. La laïcité, style rad-soc a vécu. Il faut trouver un nouveau compromis, entre l’Etat et le monde religieux. Je n’ai aucune idée sur des modalités de compromis entre la chariah et les lois de la République et j’imagine que beaucoup n’ont pas envie d’en trouver, mais il serait temps que la crispation identitaire sur la laïcité, élément fondamental d’un soit disant pacte républicain, se relâche.