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14 octobre 2010 4 14 /10 /octobre /2010 11:16

Je viens de commencer les « mémoires » de Tony Blair. Les chapitres que je viens de lire traitent surtout de la manière dont le héros a pris et exercé le pouvoir. Edifiant. Les propos de l’auteur sont destinés, ce là va de soi et même s’il s’en défend, à mettre en valeur son style, ses méthodes, son audace et son goût de l’action.

L’image que j’ai perçue est celle d’un ambitieux, ce qui n’est pas péjoratif mais consubstantiel à l’idée même de faire de la politique : on ne voit pas que l’on veuille se lancer dans l’arène publique sans projets et sans se dire que l’on est apte à les mener ; le problème de son ambition est qu’elle veut durer. Sa tristesse est centrée sur le fait que le Labour a perdu trois élections consécutives, ou que quand il était au pouvoir il était incapable de le garde plus d’une mandature ; il en arrive à se convaincre que d’avoir lui Tony Blair gardé le pouvoir pendant dix ans est une réussite en soi.

La deuxième facette du personnage est sa passion de l’activisme. Il croit, sans même tenter de le justifier, qu’une attention de tous les instants à tous les problèmes est une caractéristique d’homme d’état ; le plus drôle est que sur la politique économique, largement menée par Gordon Brown, il tient beaucoup à nous convaincre qu’il la suivait étroitement et en était le véritable inspirateur. Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi cette frénésie de s’approprier une politique qui a accéléré la financiarisation de l’Angleterre et son exposition à tous les grands vents des crises mondiales. Mais sur tous les sujets il montre cette incapacité à déléguer, à faire faire, à réfléchir plutôt qu’à se laisser submerger par des appels téléphoniques, des mails. Il croit, comme une immense majorité de la classe politique qu’il faut être informé à tous les instants (comme si l’écume des jours était importante) pour décider en permanence : l’exemple le plus ridicule est son ultimatum à l’un de ses ministres d’avoir à choisir dans les 48 heures entre sa femme et sa maîtresse pour éviter  un article à parfum scandaleux dans la presse dominicale.

Enfin apparaît cette fringale du contact avec le public qui fait croire que l’on est proche du peuple parce que l’on exprime une compassion, cette amour immodéré d’être aimé par ceux qui lisent les journaux à sensation, ce travers de croire que l’on est populaire parce que l’on passe beaucoup de temps sur sa communication.

Pour ces premières pages, ressort le portrait intéressant de l’homme politique contemporain : il privilégie le contact à la réflexion parce qu’il ne sait jamais prendre le temps d’avoir du temps, il privilégie l’instantané parce qu’il croit que l’on gère un pays heure par heure alors que seules les grandes batailles méritent cette attention, il chouchoute la communication  et les communicants et en ce faisant laisse percer sa volonté de dure au jour le jour au détriment de l’action raisonnable sur le long-terme.

Un livre éloquent sur l’homme politique d’aujourd’hui : englué par le quotidien.

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