La victoire du FN a révélé l’impuissance des Sarkozy et Copé : le premier avec sa tribune à la veille des élections européennes n’a touché personne, le deuxième a précipité l’UMP dans le désastre avec des choix de têtes de liste ahurissants : Lavrilleux, Morano, Alliot-Marie ; ni l’un, ni l’autre ne sont aptes à gérer une opposition ou à la mobiliser. Les deux guignols, dans une connivence à peine cachée, nous préparaient leur retour aux « affaires » pour 2017 l’un dans un costume de président qu’il avait déjà si mal porté, l’autre comme son premier ministre auto-proclamé ; avec leurs grands slogans du « parler vrai », de la « transparence », de l’expérience de la gestion des crises ; avec leurs copains, leurs affidés, leurs courtisans, choisis pour beaucoup parmi des héros de films de série B ; avec leur ambition candide, leur appétit de pouvoir niais, leur arrogance de nous faire croire que la France c’était eux.
Enfin est arrivé Bygmalion, l’agence qui a su recréer l’évènement : d’un désastre électoral, elle nous a fait une grande tragédie : le vieux roi est couvert de sarcasmes pour son inconduite passée, le jeune héros est démasqué pour ses faussetés ; fini les pourcentages obtenus, les petits calculs comptables par bureau de vote, les analyses pour savoir qui n’était pas venu déposer son bulletin, qui en avait déposé quand même un au mauvais nom ; on revient aux grands ressorts de toutes les tragédies : l’honneur bafoué, la honte qui s’abat sur les deux protagonistes, la lutte qui s’engage entre les deux anciens alliés, la vengeance qui fait étinceler les yeux des floués, des trahis, des laissés pour compte. Tout celà dans un tempo forcené, avec aveux larmoyants devant les caméras, perquisitions dans tous les sens, fureurs annoncées du vieux chef, visage sinistre du héros déchu dans le style Nixon mal rasé, coup de force dans le parti pour se débarrasser de celui qui sent mauvais.
Le FN plus Bygmalion, c’était peut-être la bonne recette pour enfin secouer la droite, l’amener à faire l’examen critiques des années Sarkozy et de l’interminable sommeil Chiraquien. Recette choc, qui va probablement faire beaucoup de remous pendant quelques mois ; mal nécessaire, pour qu’enfin la droite retrouve le droit de dire ce qu’elle pense, sans s’encombrer d’héritages grevés de dettes ; sans plus se formaliser des stéréotypes radical-socialiste qui encombraient les neurones de ses chefs passés ; sans plus croire que la France est ingouvernable et que les réformes ne doivent être que des potions homéopathiques ; sans plus prôner que ce qui a été fait est acquis ; enfin en arrêtant de vouloir rebâtir à partir de ruines.