La loi de la grande distribution tient en quelques axiomes :
- Vendre le moins cher possible, tout en conservant une marge pour le distributeur ; résultat mécanique, un appauvrissement des producteurs,
- Vendre une gamme restreinte de produits afin de pouvoir faire jouer au maximum la concurrence entre producteurs sur des gammes parfaitement comparables ; résultat une offre produit de moins en moins large pour le client,
- Vendre dans des grandes surfaces, agrémentées de grands parkings situées à pétaouchnok afin de limiter les coûts du foncier ; conséquence, désertification des centres des petites villes,
- Vendre avec le moins de frais possible, toujours pour améliorer la rentabilité par la baisse des coûts ; conséquence, absence totale de service.
Toutes ces règles conduisent à une infinité de désastres :
- ruine des producteurs locaux au profit du plus lointain qui arrive à contracter ses coûts en se dispensant des protections sociales et environnementales,
- Disparition du petit commerce de centre ville, incapable d’acheter à bas prix, supportant un foncier cher et payant trop de salariés par rapport à son volume de vente,
- Abaissement de la qualité moyenne des produits vendus pour tous les produits qui sont la grande cavalerie : alimentation quotidienne, appareils ménagers, ameublement, vêtements de tous les jours ; tout ce qui fait le charme du quotidien devient fadasse, fragile et trop souvent moche,
Toute cette calamité est particulièrement marquée en France. Dans la grande distribution généraliste règne un oligopole comme nulle part au monde avec Carrefour, Leclerc, Casino, Auchan. Personne ne s’émeut de la tyrannie qu’ils font régner. La moindre connivence entre fabricants fait crier à juste titre les associations de consommateurs, provoque l’intervention musclée de la Haute Autorité de la Concurrence, est donc durement sanctionnée. Problème, auquel personne ne répond est pourquoi ces fabricants n’arrêtent pas de s’entendre : c’est que pour beaucoup il s’agit d’une question de survie face à des acheteurs qui tentent de faire régner la terreur et y arrivent lorsque les producteurs ne sont ni des groupes mondiaux, ni des marques incontournables.
De toute évidence le curseur est pour l’instant mal positionné entre le producteur et le consommateur : le premier est toujours sous le soupçon de mal produire, trop cher, en s’entendant avec ses concurrents ; et pourtant c’est lui le créateur d’idées, d’objets, d’emplois, le véritable animateur du monde économique. Le second n’est jamais accusé de vendre au rabais, des marchandises mal produites chez des exploiteurs ; et pourtant c’est un massacreur d’emplois (chez ses fournisseurs bien entendu, mais aussi dans son secteur de la distribution), un tortionnaire des villes (enlaidies en périphérie, et désertifiées dans leur centre). La défense du consommateur ne peut se limiter à lui faire payer le moins cher possible un objet standard, et ce pour une raison très simple : l’objet standard, contrairement à ce que veulent nous faire croire ces grandes surfaces ne devrait pas exister ; le charme de la production est très exactement de faire des objets différents.
Oui, il faut protéger les consommateurs, mais de la grande distribution.