Pour sauver la présence des verrières de Viollet le Duc dans des chapelles latérales de Notre-Dame la seule question intéressante et difficile est de savoir si elles sont belles. Suis-je satisfait en contemplant ces oeuvres ? Non. Sont-elles originales ? De ce style on en retrouve dans un pléthore d’églises en France. Sont-elles harmonieuses ? Seulement par la répétitivité d’un motif banal. Sont elles inspirantes ? Non, ni par leurs couleurs ternes, ni par un manque d’élan, suscitent-elles un sentiment de transcendance.
Leur seule présence ne peut se justifier que si l’on ne peut trouver d’artiste capable de faire mieux, ou que l’on considère qu’elles font partie d’un tout (la restauration de Notre-Dame par Viollet le Duc considérée comme une œuvre totale). Je ne doute pas qu’un artiste existe qui puisse relever le défi (Claire Tabouret, peut-être, à condition de mieux voir son projet). Je crois que l’oeuvre totale à Notre-Dame est celle des créateurs qui ont monté la voute, le portail et la flèche initiale et trouvé une harmonie extraordinaire. Les ajouts ultérieurs ne doivent être admis qu’à condition qu’ils ne la travestissent pas : quelques vitraux dans un coin ne sont pas effectivement essentiels dans l’esthétique globale (qu’ils soient là ou pas ne change rien à l’équilibre et la beauté globale).
Derrière cette question accessoire de la survie de l’oeuvre de Viollet-le-Duc se pose la question du droit de l’artiste, même post mortem, d’imposer ses créations dans l’espace public : quel droit a Buren de nous imposer ses horreurs dans l’enceinte du PalaisRoyal, que d’oeuvres médiocres des Raynaud, Koons, Anish Kapoor, viennent encombrer les lieux de promenade. Que d’artistes dans le style troubadour ont enlaidi Azay-le-Rideau, et l’intérieur de tant de châteaux pour des durées indéfinies. Le code du patrimoine n’a pas été créé pour perpétuer le laid ou le médiocre. A fortiori les instruments non légaux comme les normes proposées par la charte de Venise ou l’UNESCO.
Le goût est subjectif et évolutif, la beauté est intemporelle.