Le mariage pour tous n'est pas l'extension d'un droit, comme se plaisent à nous seriner les journaleux comme Thomas Legrand sur France Inter lundi matin, ou Augustin Trapenard dans le Grand Journal de canal+ : le droit au mariage est déjà parfaitement complet; n'importe quelle femme en âge de le faire a le droit d'épouser n'importe quel homme en âge de l'accepter et réciproquement; c'est une capacité de contracter entre deux êtres libres et capables dans le but d'institutionnaliser un engagement long-terme, et, le plus souvent, si possible, d'engendrer une descendance. Construction, basée sur le libre-arbitre, elle affirme la liberté des parties de choisir dans le champ des possibles; ce n'est pas un droit à faire n'importe quoi, c'est le droit d'exercer une prérogative dans le respect des qualités respectives de l'un et de l'autre, et en particulier de leur nature biologique.
Le mariage pour tous a deux objectifs : élargir le champ des possibles entre deux partenaires qui veulent s'engager sur le long-terme, et dissocier l'engendrement du mariage.
Le premier objectif s'il n'offense aucun principe de logique (établir des liens de long-terme entre deux êtres quels qu'ils soient), reste une bizarrerie quant aux fins de ce contrat; nul ne voit l'intérêt pour la société d'institutionnaliser la sexualité des sodomistes et des saphistes. Les intérêts matériels qu'apporte ce type d'union pour les parties sont certains (pension de réversion, droit à l'héritage, droit au logement etc...). Mais l'acceptation de ce type d'union transporte la sexualité de la sphère privée dans la sphère publique (au nom de la transparence ?), fait croire que tous les comportements sexuels sont équivalents (au nom du relativisme ?), veut transformer la notion de couple en lieu d'assouvissement de ses pulsions (au nom de la liberté sexuelle ?). Tout est discutable dans cette approche, rien ne constitue l'extension de droits déjà acquis.
Le deuxième objectif est lui partie intégrante de la généralisation du "droit à" qui pollue toute la vie sociale. Du droit à disposer de son corps, qui est un des éléments constitutifs de la liberté individuelle, qui est donc attaché à chaque personne, qui devrait être inaliénable, un glissement s'est fait vers un droit sur les autres. Le droit d'avorter en a été une des premières manifestations : la querelle s'est centrée, à juste titre, de savoir quand l'embryon devenait un être, certains le pensant dès la conception, d'autres un peu plus tard; le problème reste entier que le droit à avorter ne peut jamais se transformer en un droit sur un être. La deuxième manifestation, beaucoup plus ancienne, est le droit d'adoption plénière qui, par un jugement, rompt tout lien de filiation biologique; là encore au nom d'un droit à l'enfant, d'un droit au bonheur, se constitue une privation de liberté sur l'être adopté. La dérive s'accentue avec l'adoption par des couples homosexuels : au nom de considérations pratiques (le statut du ou des beaux-parents), de considérations philosophiques (le droit au bonheur de couples par définition stériles), la privation de liberté des enfants adoptés se fait non seulement vis-à-vis du ou des parents biologiques mais en plus dans le mensonge biologique.
Le droit à l'enfant ne fait pas partie de nos libertés individuelles (droit de penser, de s'exprimer, de se déplacer, de posséder) mais est une créance sur un autre être. Il se veut être un droit au bonheur qu'il est impossible de définir; il est de fait une expression de l'envie la plus élémentaire : "je veux disposer aussi de ceux qu'ont les autres". Ce n'est pas l'extension d'un droit, c'est l'assouvissement d'un sentiment médiocre.